En quelques années Twitter est devenu un outil de plus en plus influent pour le monde médiatique mais aussi politique. En plus d'une communauté mondiale nommée Twittos, la plupart des journalistes et des personnalités politiques disposent aujourd’hui d’un compte qui leur permet de s’informer, mais aussi de partager des informations.
Mais il y a une partie de cet outil que nous ne voyons pas et qui a pourtant une importance capitale dans son fonctionnement. Cette partie c’est l’algorithme. Nous n’allons pas nous lancer dans une explication complexe de ce qu’est l’algorithme, mais nous pouvons dire que c’est une sorte de cerveau numérique, qui fait des liens en fonctions des données qu’il reçoit de chaque utilisateur et qui envoie des suggestions à l’utilisateur en fonction de ces données.
C’est grâce à cet algorithme que nous pouvons être mis en lien et informer. Cependant l’algorithme a tendance à nous enfermer dans une bulle d’information, dans une bulle d’influence qui nous coupe du reste des informations qui circulent. Le documentaire, « Derrière nos écrans de fumée » le montre d’ailleurs très bien.
Le problème que cela pose c’est que l’algorithme est en fait très influençable, il est sensible à ce que nous likons et ce que nous partageons le plus souvent, ce qui fait qu’il nous propose de l’information par rapport à ces données et que nous restons en vase clos avec des personnes qui pensent exactement la même chose que nous, qui partagent exactement les mêmes choses que nous. Nous pouvons d’ailleurs le remarquer quand, sur nos fils d’actualité, nous avons plusieurs fois la même information avec les mêmes images, les mêmes sources, des divers comptes que nous suivons, ou qui a été « liké » par des personnes auxquelles nous sommes abonnées et dont nous « likons » partageons souvent le contenu.
Nous pourrions penser que Twitter est une entité différente des systèmes d’informations classique, mais c’est en fait un système qui est composé de plusieurs systèmes et nous voilà donc, par la force des algorithmes, enfermés dans des bulles d’informations (que j’ai déjà abordé ici) à l’intérieur même de Twitter.
Comme nous sommes dans une forme de bulle où nous sommes tous d’accord, nous sommes influencés à maintenir une idéologie, par les likes et les partages et nous finissons par croire que nous avons raison. Même si nous venons à nous abonner à des comptes qui pensent ou disent des choses différentes de notre bulle, ils peuvent nous être totalement occultés par la fréquence de nos agissements de like et de partage qui nous maintiennent dans des propositions qui correspondent à notre comportement numérique. Autre phénomène que nous pouvons remarquer, c’est un agissement souvent inconscient et parfois aussi conscient de chercher ce phénomène de like et de partage. Nous en arrivons à provoquer par nos Tweets ce phénomène de "course au like" en abordant des sujets, qui nous le savons consciemment ou inconsciemment, alimentent une polémique et va faire réagir nos abonnés et attirer d’autres personnes que nous n’avions pas dans nos contacts, qui vont entrer et alimenter notre bulle d’information.
Quand nous venons à rencontrer une autre bulle d’information sur Twitter, que nous interagissons comme nous avons l’habitude dans notre petite bulle de confort où tout le monde pense comme nous, nous nous confrontons à d’autres personnes manipulées de la même façon par les algorithmes et c’est le clash assuré. Chacun va interagir en fonction de son conditionnement mental et va se voir enorgueillie par les likes qu’il recevra de sa « communauté numérique ». Comme chacun de notre côté sommes persuadés d’avoir raison, rien ne peut nous réconcilier, les débats sont stériles, les échanges sont souvent d’une violence inouïe et comme nous restons campés sur nos positions sans nous remettre en question, bien souvent nous nous traitons mutuellement de « troll » ou autres termes dévalorisants.
Nous ne devons pas croire pour autant que cela s’arrête à Twitter les journaux d’informations télévisées, radiophoniques ou écrits, font exactement la même chose. La différence c’est qu’ils ne sont pas influencés par un algorithme (quoique maintenant oui puisque beaucoup de journalistes s’influencent de ce qui se passe sur les réseaux sociaux), ils ont par leur position, accès à l’information de façon globale, mais décident de l’information à nous partager en fonction de l’influence qu’ils veulent atteindre sur la population, du moins c’est dans ce sens que l’information est la plupart du temps diffusée.
Si nous continuons dans ce schéma, nous ne pouvons qu’alimenter la fracturation de la société parce que la machine nous gouverne, nous « aide » à penser pour ne pas dire nous influence, elle nous pousse dans nos travers en accentuant notre désir de vouloir avoir raison, notre souhait primaire de vouloir défendre un camp et de voir nos frères et sœurs humains comme des ennemis à combattre.
Twitter était un formidable outil qui pouvait mettre en relation des personnes de milieux différents, qui pouvait permettre d’avoir une information alternative et plus large que ce que les médias classiques pouvaient proposer ou imposer. Mais voilà que la technique par une forme d’intelligence artificielle, créer des clans, divise les êtres pour les cantonner dans leur positionnement. Elle crée des cercles d’influence que l’on pourra, à souhait dénoncer de complotisme ou de terrorisme.
La technique de l’intelligence artificielle ne permet pas le débat, la libre pensée, au contraire elle alimente dans le cas de Twitter les divergences et la fermeture d’esprit. Elle donne la possibilité de nourrir un plaisir narcissique par un besoin de reconnaissance de groupe. Cela créé une forme d’addiction à ce que va dire ou partager notre bulle, sur ce que l’actualité va amener pour alimenter la polémique et alimenter ces groupes, nous transformant peu à peu en chasseur de scoop.
Le but de Twitter, c’est que nous ne sortions pas de ces bulles d’influences, c’est pourquoi de temps en temps un compte très influent du groupe se fait éliminer du jeu. Cela crée un effet de solidarité, nous en voulons à Twitter, nous le maudissons, nous critiquons et trouvons toutes les excuses du monde pour dire que c’est la force du capitalisme, de la pensée unique, mais, mais, nous ne quittons pas Twitter pour autant… La machine nous contrôle, car elle a pris possession de notre cerveau, de notre psychologie, elle sait nous rassembler, elle sait nous diviser, elle sait nous maintenir dans le système avec bien entendu notre consentement et notre participation.
Nous sommes ainsi, rentrés dans une boucle où nous alimentons la machine et la machine nous alimente. Nous ne parlons plus avec notre voisin, avec certaines personnes de notre famille parce que nous sommes tombés dans ce travers d’influence et d’informations biaisées.
Tout n’est pas à jeter cependant, Twitter a permis de belles rencontres, comme nous pouvons en faire lors d’une manifestation, des personnes qui partagent nos valeurs et avec qui nous avons plaisir à échanger, mais cela reste une minorité de personnes. C’est peut-être d’ailleurs avec ces personnes qui partagent nos valeurs, que les débats sont les plus intéressants et sans doute ce qui se rapproche le plus de ce que nous pouvons vivre dans le monde réel : Des personnes de milieux différents, de bords politiques différents avec qui nous arrivons à faire société. Si nous devons reconnaître un point positif à la machine, c’est celui-ci, de faire belles rencontres qui malheureusement trop souvent, restent numériques, nous ne savons pas si dans le monde réel, le reste de ce qui fait les relations humaines nous lierait autant que numériquement.
La société humaine, je n’invente rien et je ne vous apprends rien, doit se faire dans le réel, dans un dialogue de vive voix, dans un contact corporel, dans une rencontre des âmes. Les réseaux sociaux ont fait leur temps Facebook devient une ombre et Twitter en prendra aussi le chemin. Nous avons essayé les machines pour nous rencontrer, cela a eu du succès tant que la machine ne voulait pas prendre le dessus sur notre psychologie. L’humain doit avoir ce réflexe primaire de se retrouver entre humains, c’est sans doute pour cela que les manifestations ne se font pas numériquement mais dans le vrai vie.
J'ai pris Twitter pour exemple, pour expliquer les enjeux que les outils numériques peuvent avoir sur notre comportement individuel et qui peut avoir une conséquence sur la société. Parce que cela a forcément une influence sur la société, la violence des images et des échanges, les positionnements fermés, les menaces sont ces petites graines que nous retrouvons sur les réseaux sociaux et qui ont répercussion sur la vrai société humaine. Twitter disparaîtra pour laisser place à d'autres réseaux plein de belles promesses, comme toujours, mais la dérive, la tentation de pouvoir utiliser la machine, la technique pour influencer sera toujours présente, cela prendra une autre forme, car ce que je viens de décrire finira par être décrypté par une majorité. Cela poussera toujours la technique à s'améliorer dans sa quête de perfection pour avoir un contrôle sur l'humain.
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